Imaginez votre aorte, l’artère la plus grosse, qui transporte le sang à partir de votre cœur jusqu’à vos membres et vos organes. Maintenant, imaginez la paroi de l’aorte qui présente un point faible. À chaque battement de cœur, ce point se gonfle vers l’extérieur.
C’est ce qu’on appelle un anévrisme. Les anévrismes passent souvent inaperçus.
« Ce n’est pas comme dans le cas d’une crise cardiaque, où les douleurs thoraciques constituent un signe d’avertissement. Un anévrisme peut se produire sans entraîner de symptômes », explique la Dre Thais Coutinho, cardiologue et chercheuse. Cependant, si l’anévrisme se rompt, il entraîne une hémorragie, ce qui peut causer la mort. Le tiers des personnes qui subissent une rupture d’anévrisme de l’aorte thoracique (AAT) s’effondrent et meurent sur le coup, sans avoir le temps d’obtenir des soins médicaux.
Grâce aux contributions des donateurs de Cœur + AVC, la Dre Coutinho cherche à réduire le taux de mortalité en cas de rupture d’un AAT.
Une recherche novatrice
Des vaisseaux sanguins sains sont essentiels à la santé cardiaque et cérébrale. Même si un anévrisme peut survenir dans n’importe quel vaisseau sanguin, la Dre Coutinho se penche sur l’aorte.
Dans le cadre de ses travaux novateurs, elle a découvert que le risque qu’un anévrisme grossisse rapidement augmente lorsque la paroi de l’aorte est rigide. Grâce à sa recherche, nous pourrons émettre de nouvelles recommandations médicales pour le traitement d’un AAT.
La Dre Coutinho est chef de la Division de prévention et réadaptation à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa et professeure adjointe de médecine à l’Université d’Ottawa. Dans le cadre de ses fonctions, elle rencontre des patients qui vivent avec un anévrisme de l’aorte stable. Certains ont reçu un diagnostic en raison d’antécédents familiaux, mais la plupart d’entre eux l’ont découvert par hasard, après avoir passé une radiographie thoracique pour d’autres raisons.
Selon les recommandations médicales actuelles, on traite ces patients avec des bêtabloquants afin de réduire la pression artérielle, et si l’anévrisme atteint une certaine taille, on recommande une intervention chirurgicale.
« Cependant, la taille ne révèle pas tout », affirme la Dre Coutinho. Les recommandations sont souvent formulées à partir de données obtenues auprès des hommes et ne tiennent pas compte de la taille souvent inférieure chez les femmes, poursuit-elle. C’est pourquoi elle concentre ses travaux sur l’élasticité de l’aorte, qui est un indice de santé de la paroi de l’aorte.
L’importance de l’élasticité
« À chaque battement de cœur, une très grande pression est produite. L’élasticité de l’aorte sert de tampon en atténuant cette pression », explique la Dre Coutinho. Par contre, si l’aorte est rigide, l’anévrisme subit le coup de cette pression, ce qui peut mener à une rupture.
C’est en faisant un échocardiogramme et en utilisant d’autres instruments que la Dre Coutinho a pu mesurer l’élasticité de l’aorte et, au fil du temps, établir un lien avec l’expansion d’un AAT.
« Nous avons découvert que le fonctionnement aortique prédit l’expansion future de l’anévrisme, mais aussi qu’il est plus déterminant que tout autre facteur de risque clinique[, y compris la taille de l’AAT] », mentionne-t-elle.
Dans ses travaux, elle étudie l’incidence que peuvent avoir le sexe et le genre. En tant que directrice du Centre canadien de santé cardiaque pour les femmes à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa, elle sensibilise les autres chercheurs ainsi que le public quant au sexe, au genre et aux maladies du cœur. De plus, elle les informe qu’il faut davantage de recherche tenant compte de ces facteurs.
Les femmes sont plus à risque de mourir
Des études antérieures ont démontré que les femmes ayant un AAT sont 3 fois plus à risque que les hommes de subir une rupture d’anévrisme et sont 40 % plus à risque d’en mourir si l’élasticité de l’aorte est réduite.
De plus, la recherche de la Dre Coutinho démontre qu’un AAT grossit deux à trois fois plus rapidement chez la femme que chez l’homme. Bien que l’AAT soit plus commun chez ce dernier, l’élasticité semble être un facteur important chez la femme.
La Dre Coutinho prévoit étudier les biomarqueurs qui prédisent l’expansion d’un AAT, afin de trouver un meilleur moyen de prévenir les risques de complications une fois que cette maladie silencieuse est diagnostiquée et, par le fait même, de trouver de nouveaux traitements. Dans sa recherche, elle continue d’analyser les différences entre les hommes et les femmes et essaie de déterminer l’importance du rôle que jouent la physiologie et les hormones.
Dans le cadre de son travail au Centre canadien de santé cardiaque pour les femmes, elle participe à l’élaboration d’une trousse d’outils destinée aux chercheurs qui étudient le cœur, pour les aider à intégrer les différences entre les sexes et les genres dans leur projet de recherche. « Ils doivent prendre en compte le sexe et le genre dans tous leurs travaux. Il est essentiel de se pencher sur cette question. En gardant en tête cette optique, nous obtiendrons de meilleures données scientifiques, et la population sera en meilleure santé. »
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