Améliorer le bilan chez les femmes ayant subi un AVC

Un nouveau réseau de recherche dirigé par la Dre Amy Yu s’intéresse aux différences liées au sexe et au genre dans les soins de l’AVC.
Dr Amy Yu

La Dre Yu est professeure adjointe de médecine à l’Université de Toronto et neurologue spécialiste de l’AVC au Sunnybrook Health Sciences Centre de Toronto.

La Dre Amy Yu voit grand. Elle est à la tête d’un ambitieux nouveau projet de recherche visant à améliorer la santé des femmes après un AVC. Le réseau qu’elle dirige est constitué de plus de 50 spécialistes de partout au pays et issus d’horizons divers : médecine clinique, recherche, génie, informatique, statistique, éducation, processus décisionnel, en plus de personnes ayant une expérience vécue et d’autres parties prenantes.

Le projet de la Dre Yu, StrokeGoRed, s’est vu octroyer un montant de 5 millions de dollars sur cinq ans par l’entremise des Réseaux d’excellence en recherche sur la santé cardiaque et cérébrale des femmes. Cette nouvelle initiative est financée par Cœur + AVC, en partenariat avec la Fondation Brain Canada et l’Institut de la santé des femmes et des hommes des Instituts de recherche en santé du Canada.

Une équipe importante pour un objectif qui l’est tout autant. Comme l’affirme la Dre Yu, professeure adjointe de médecine à l’Université de Toronto et neurologue spécialiste de l’AVC au Sunnybrook Health Sciences Centre de Toronto, son équipe s’intéresse à l’entièreté du continuum de soins de l’AVC. On parle ici de tout ce qui touche la compréhension des facteurs de risque et de la prévention de l’AVC, jusqu’au rétablissement et à la réadaptation post-AVC, en passant par les soins de courte durée.

Cœur + AVC a demandé à la Dre Yu ce qui distingue le projet StrokeGoRed, de quelle façon il permettra de s’attaquer à certains des enjeux les plus pressants concernant les femmes et l’AVC, et quels sont les objectifs de l’équipe. 

Quel problème cette recherche vise-t-elle à résoudre?

Dre Yu : Nous savons que le vécu des femmes et des hommes touchés par l’AVC est différent en ce qui concerne les facteurs de risque, l’évaluation diagnostique et parfois les méthodes de traitement. Il a en effet été démontré, dans le cadre de recherches menées au Canada et ailleurs dans le monde, que les femmes se rétablissent moins bien après un AVC, et ce, à la lumière des méthodes actuelles d’évaluation des résultats. À titre d’exemple, elles ont plus souvent besoin de soins de longue durée et présentent davantage d’incapacités.

StrokeGoRed est l’acronyme de Stroke in Women: Growing Opportunities to Realize optimal Evaluation, Diagnosis, and outcomes (« L’AVC chez les femmes : Augmentation du nombre d’occasions d’optimiser les évaluations, les diagnostics et les résultats »). Notre objectif premier était de nous réunir pour étudier le parcours des femmes et des hommes touchés par l’AVC tout au long du continuum de soins. Nous voulons faire la lumière sur les différences entre les sexes, leur importance, et découvrir comment améliorer la personnalisation des soins.

Pouvez-vous nommer quelques-uns des aspects des soins de l’AVC qui seront examinés?

Dre Yu : Il y a plusieurs volets. Le premier est un volet exploratoire portant sur la compréhension des facteurs de risque selon les sexes. En quoi devrait consister le dépistage chez les femmes? De quoi les femmes devraient-elles être conscientes lorsqu’elles s’adressent à leurs médecins ou réfléchissent à leur santé?

Il y a également un volet descriptif, dans le cadre duquel nous étudierons les résultats rapportés par les patientes et patients, et analyserons certains éléments, notamment le sommeil, la cognition, la santé mentale et le retour au travail. À cette étape, nous tenterons de découvrir comment mieux soutenir les patients, ou encore, quels domaines de recherche privilégier pour trouver des traitements ou des stratégies de prise en charge plus efficaces en lien avec ces enjeux.

Quels sont les avantages de l’approche du réseau en matière de recherche?

Dre Yu : La très vaste expertise des membres du réseau permettra de faire progresser les connaissances sur les différences entre les sexes et les genres en lien avec l’AVC. Le financement nous permet de poser des questions dans tous les domaines.

Il est extrêmement stimulant de pouvoir réunir à la fois des spécialistes de différents domaines (p. ex. l’AVC mineur, l’AVC en phase aiguë, l’imagerie, la réadaptation et les résultats rapportés par les patientes et patients), une sommité autochtone, des patientes et patients partenaires, et plusieurs autres parties prenantes.

Avec toutes ces personnes autour de la table, nous disposons d’une perspective très large et d’une grande diversité de points de vue sur les sujets étudiés, au sein d’un groupe extrêmement collaboratif.

De quelle façon le réseau abordera-t-il les sujets spécifiques?

Dre Yu : Voici un exemple. La ou le spécialiste en réadaptation post-AVC posera des questions inédites sur la réadaptation et, au sein du réseau, pourra solliciter l’avis des spécialistes en matière de prévention. Les parties pourront décider de faire équipe pour élaborer leur questionnaire et leurs analyses et examiner l’incidence que pourraient avoir les soins hospitaliers sur la réadaptation.

Pourquoi est-il important pour le réseau d’intégrer des personnes ayant une expérience vécue de l’AVC?

Dre Yu : Ces personnes ont une expérience intime du continuum de soins, ce que nous, spécialistes du domaine clinique et de la recherche, n’avons pas dans nos champs d’expertise spécifiques.

Les personnes ayant une expérience vécue nous aident à formuler nos questions et nous assurer que celles-ci intéressent les patientes et patients. Elles nous éclairent également sur la façon dont nous menons notre recherche. Si nous élaborons un questionnaire, nous devons faire en sorte que nos questions sont acceptables pour les personnes auxquelles elles s’adressent.

Quels changements espérez-vous voir dans les cinq prochaines années comme suite à cette recherche?

Dre Yu :: La recherche générera plusieurs publications et présentations scientifiques. Nous prévoyons présenter de nouvelles connaissances sur les différences liées au sexe et au genre en matière d’AVC, qu’il s’agisse des facteurs de risque, de la façon de mieux traiter les patients, de la réduction des inégalités dans les soins ou des marqueurs des examens d’imagerie sur la santé du cerveau subséquents.

Dans l’ensemble, j’espère que nous répondrons à certaines questions sur la façon de mieux personnaliser les soins chez les femmes en matière d’AVC, dans nos cliniques, nos hôpitaux et nos centres de réadaptation.

Je souhaite que nos conseils aident les cliniciennes et cliniciens à orienter leur pratique et améliorent la perception et les connaissances de la population au sujet des risques et des facteurs de risques de l’AVC.

Qu’est-ce qui vous emballe le plus personnellement?

Dre Yu : Ces travaux auront une influence positive sur les soins cliniques ainsi que sur les questions et les recherches futures dans ce domaine. J’ai la conviction que nous allons évoluer en tant que spécialistes de la médecine clinique et de la recherche.

Je suis également ravie de notre aptitude à renforcer nos capacités et à soutenir la prochaine génération de chercheuses et de chercheurs dans ce domaine. Nous allons annoncer un concours pour les détentrices et détenteurs de bourses postdoctorales dont les travaux portent sur le sexe et le genre en matière d’AVC et de réadaptation après un AVC.

De plus, nous approfondissons notre connaissance des communautés autochtones, en particulier celles du nord du Manitoba, et nous développons des collaborations et des relations avec ces communautés. Grâce à une meilleure compréhension et à une plus grande confiance, nous serons en mesure d’aider ces communautés à répondre à leurs questions concernant leur santé.